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Haïti: Transplantation d'organes au 21 siècle

Dr. Jacques M. Jeudy, Chirurgien Urologue / Chirurgien de Transplantation d'Organes


"Depuis le succès de la première greffe de rein en 1954 à l'hôpital Brigham Women de Boston aux Etats Unis, plus de 500.000 transplantations d'organes ont été pratiquées de par le monde. Les greffes de foie, du pancréas, des reins, du coeur, des poumons, de la moelle osseuse et des intestins sont actuellement d'usage courant, avec un taux de succès de plus en plus satisfaisant, sans oublier la greffe de la cornée et de la toute dernière en date qui est la transplantation de la face. La science de la transplantation a bénéficié énormément des recherches de l'immunopathologie, de la pharmacologie et autres sciences relatives dans la lutte contre la défaillance d'organes vitaux ou essentiels à une bonne qualité de vie.

Transplantation de Foie

Parce que le foie constitue l'usine de production de la majorité des protéines essentielles à la survie de l'être humain (facteurs de coagulation, albumine, globulines et autres), parce qu'il assure la réalisation des phénomènes métaboliques de très haute valeur vitale tels que gluconéogenèse, formation de bile, et autres activités enzymatiques, la défaillance hépatique expose le malade à des désordres métaboliques extrêmement graves, mettant sa vie en danger , parfois de façon urgente et rédhibitoire. Ces anomalies sont les conséquences fréquentes, soit de l'alcoolisme (cirrhose de foie), des hépatites virales ou médicamenteuses, et, d'incidence de plus en plus grande, du syndrome tumoral causé par le cancer du foie. Soulignons que le foie cirrhotique et post hepatitique (la forme chronique active des hépatites B et C) constitue un foyer privilégié pour le développement du cancer du foie (80% des cas de cancer du foie).
La cirrhose du foie constitue à l'heure actuelle près de la moitié des causes de l'insuffisance hépatique terminale, suivie des hépatites virales (hépatites B et C) et en fin de compte du cancer du foie dont l'évolution est en général foudroyante et sans merci.
Actuellement, la transplantation du foie constitue le traitement de choix de l'insuffisance hépatique terminale et du cancer du foie localisé.
La transplantation de foie peut être réalisée soit à partir de donneurs cadavériques (le foie dans son entièreté, en général) ou de donneurs vivants (lobe hépatique). Vu l'état urgent des malades en insuffisance hépatique terminale, la rareté de donneurs cadavériques de foie (le nombre de ces donneurs cadavériques a très peu changé depuis plus de 20 ans) et l'incidence de plus en plus croissante de malades avec insuffisance hépatique, on s'est rabattu, faute de mieux, sur les donneurs vivants, pour une donation d'environ 60% de leur fonction hépatique. Soulignons qu'après la chirurgie de donation le foie restant subit rapidement une hypertrophie compensatrice extraordinaire, retournant quasiment à la même dimension qu'avant le prélèvement (pas nécessairement à la même place !). De façon très intéressante, cette même hypertrophie compensatrice est aussi retrouvée chez le receveur du foie, presque dans le même laps de temps noté chez le donneur. Le département de transplantation hépatique de l'université de Miami/Jackson Memorial Hospital offre un taux de survie du patient de 84% à cinq ans, avec en plus une qualité de vie qu'aucune autre modalité de traitement ne peut donner. Actuellement, 90% des patients ayant bénéficié d'une transplantation hépatique reprennent le chemin de l'école ou du travail, et ce au prix d'une bonne réhabilitation et d'un suivi médical régulier en post transplantation.
En fin de compte, les résultats de la transplantation hépatique sont encore plus satisfaisants dans les cas de cancer du foie localisés, qui sont pratiquement guéris par la transplantation hépatique, mais ces résultats sont bien moins satisfaisants s'il s'agit d'hépatite C, en raison du risque de récidive de l'hépatite C sur le foie transplanté.

Transplantation pulmonaire

Pratiquée à une échelle moindre, la greffe de poumon s'effectue à partir soit de donneurs cadavériques (poumon entier) ou de donneurs vivants (un lobe pulmonaire).
La première transplantation pulmonaire eut lieu en 1963 à l'université de Mississipi des Etats Unis avec un succès mi figue mi raisin ; le patient mourut 18 jours après la chirurgie des suites de complications du rejet de l'organe transplanté. Il a fallu attendre les années 80 pour assister à une véritable explosion dans le domaine des transplantations pulmonaires (poumon simple ou double et combinaison du bloc coeur -poumon). Ce succès était le résultat de raffinements chirurgicaux, d'une meilleure prise en charge post opératoire, d'une immunosuppression plus performante avec la cyclosporine et de l'accès au pontage cardio pulmonaire.
Les indications de la transplantation pulmonaire les plus fréquentes restent essentiellement les mêmes : la maladie pulmonaire obstructive et la maladie fibrokystique avec détérioration irréversible des poumons. Soulignons que le cancer du poumon constitue une contre-indication absolue à la transplantation pulmonaire, à cause de la survenue habituelle d'une flambée tumorale et métastatique liée à la nécessaire immunosuppression anti rejet.
Près de 3000 transplantations pulmonaires ont été effectuées aux Etats-Unis depuis l'implémentation de cette chirurgie. Les résultats, bien que moins satisfaisants que ceux de la greffe rénale et hépatique, s'améliorent de plus en plus, avec à l'heure actuelle une survie du patient de 70% à 2 ans après la greffe.

Transplantation cardiaque

Grace aux progrès du pontage cardio pulmonaire et du raffinement des soins intensifs post opératoires, la greffe cardiaque a permis de sauver des milliers de vies humaines.
La transplantation cardiaque se fait seulement à partir de donneurs cadavériques, pour des raisons bien évidentes de totalité de fonction du coeur et de non régénération du tissu cardiaque après amputation et agression sévère.
La greffe cardiaque assure à l'heure actuelle une survie du patient de 87% à un an et de 61% à cinq ans, avec en plus une qualité de vie assez raisonnable. L'énorme succès de la transplantation cardiaque est lié de façon significative à la découverte du tacrolimus (Prograf) et d'un meilleur suivi post opératoire.
Entre 2500 et 3500 transplantations cardiaques sont effectuées chaque année au niveau de 200 centres de transplantation établis dans le monde entier. Les indications de greffe cardiaque les plus fréquentes sont constituées par la maladie artérielle coronarienne et la cardiomyopathie idiopathique.

Transplantation Intestinale

Pratiquée aux Etats-Unis depuis plus de 14 ans, la transplantation intestinale ou multi viscérale (foie, estomac, intestin...) sauve la vie de centaines de patients en état d'insuffisance intestinale absorptive (short gut syndrome) causée en général par des résections chirurgicales itératives, des catastrophes vasculaires au cours des chirurgies splanchniques ou des désordres fonctionnels comme ceux retrouvés dans les cas de maladie de Hirshprung généralisée.
Depuis le début de cette chirurgie en 1995, plus de 300 transplantations intestinales ont été effectuées dans le monde entier, dont près de la moitié à l'Université de Miami/Jackson Memorial Hospital. Celle-ci est réputée, de concert avec le centre de transplantation multi viscérale de Pittsburg, comme le centre pionnier de la greffe intestinale adulte et pédiatrique.
Le greffon est obtenu à partir de donneurs cadavériques aux Etat Unis et en Europe ; le Japon et la Chine continuent d'utiliser les 25 centimètres d'anse intestinale à partir de donneurs vivants (pour des raisons culturelles dont les détails dépassent le cadre de cet article).
Selon le Registre de Transplantation Intestinale, la survie du greffon à un an se chiffre à environ 60% .Les causes de morbidité et de mortalité relatives à la transplantation intestinale sont essentiellement liées aux infections, au phénomène de rejet (l'intestin étant très immunogenique en raison de la présence des plaques de Payer), le graft versus host disease (GVHD) et les tumeurs malignes.

Transplantation du Pancréas

Le pancréas est en général transplanté comme un élément du bloc réno-pancréatique chez les diabétiques insulino dépendants. La transplantation pancréatique s'est rapidement répandue à partir des années 80, avec la découverte de la cyclosporine comme élément de base du régime de l'immunosuppression de maintien.
La greffe pancréatique corrige le défaut insulinique et restaure un bon nombre des complications du diabète, telles que la neuropathie végétative, la cardiomyopathie diabétique, et, de façon plus spectaculaire, la perte de l'alarme de l'hypoglycémie, considérée d'ailleurs comme l'indication clef du remplacement pancréatique. La transplantation du pancréas constitue donc une part importante de l'arsenal thérapeutique contre le diabète insulino dépendant.
Pour l'instant, le pancréas est transplanté soit comme organe entier ou sous forme d'ilots de Langerhans au travers du système de la veine porte vers les sinusoïdes hépatiques. La survie de la greffe pancréatique avoisine celle des transplantations rénales cadavériques qui feront l'objet du prochain chapitre.

Transplantation Rénale

Pionnière de toutes les formes de transplantation d'organes, la greffe rénale est universellement acceptée et utilisée comme le traitement de choix de l'insuffisance rénale chronique. Elle se fait soit à partir de donneurs vivants soit à partir de donneurs cadavériques. Elle offre plus de 94% et 89% de survie du patient à cinq ans pour les transplantations obtenues à partir de donneurs vivants et cadavériques respectivement. Elle pallie les carences de la dialyse qui, bien très utile pour assurer l'ultrafiltration avant la réalisation d'une bonne fonction rénale au travers de la greffe rénale, ne remplace que 10% de la fonction des reins.
La transplantation rénale corrige très vite les nombreuses anomalies métaboliques, hydro électrolytiques et hormonales chez le patient en hémodialyse. Elle a la capacité de redonner l'essence et la couleur de vie, perdues tout au long de la période de l'insuffisance rénale chronique et de la dialyse. Bien que considérée comme une chirurgie très spécialisée et difficile, la greffe rénale est actuellement exécutée de façon routinière et avec succès par des chirurgiens de transplantation sérieusement entrainés et disciplinés.
La transplantation rénale offre de meilleurs résultats que toutes les autres formes de transplantation d'organes, aussi bien chez l'enfant que chez l'adulte. La transplantation rénale est actuellement appliquée aux enfants depuis l'âge de 1-2 ans et aux adultes, jusqu'à l'octogénaire qui est en état de santé suffisamment équilibré pour supporter le stress d'une chirurgie majeure.

Conclusion

Les cinq dernières décades ont produit une explosion extraordinaire de la transplantation d'organes. Ces progrès n'ont été obtenus qu'au prix du travail assidu de la communauté des professionnels de transplantation, du support de la société civile et des avancées remarquables qui ont eu lieu au niveau des spécialités connexes comme l'immunologie, la pharmacologie et la science chirurgicale."

Jacques M. Jeudy, M.D
Chirurgien Urologue
Chirurgien de Transplantation d'Organes (Foie, Rein, Pancréas, Intestin)

Source :
http://www.lenouvelliste.com

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