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Médecine de pointe : Berne et Bâle fusionnent

"Planification hospitalière - Le directeur des Hôpitaux universitaires de Genève, Bernard Gruson, s’exprime sur la répartition des centres de médecine de pointe, alors que Berne et Bâle ont annoncé hier leur collaboration pour créer un grand pôle de chirurgie cardiaque et de neurochirurgie."


"L'heure est aux économies et par conséquent à la collaboration. Berne et Bâle, on l'a appris hier, vont unir leurs forces dans la médecine de pointe. Dès l'an prochain, les deux hôpitaux universitaires vont fusionner leurs départements de chirurgie cardiaque pour former le plus important centre du genre en Suisse. Ils devraient également collaborer dans le secteur de la neurochirurgie."

"Le pôle de chirurgie cardiaque devrait voir le jour en automne 2007 sous la direction du professeur Thierry Carrel, médecin chef de la chirurgie cardiaque à l'Hôpital de l'Ile, à Berne. Ce nouveau centre devrait pouvoir mener près de 2000 opérations par an.

La démarche s'inscrit dans le contexte de la discussion sur les lieux devant se répartir la médecine de haute technologie en Suisse. Qui obtiendra les greffes du cœur ou du foie? Qui gardera la chirurgie pédiatrique digestive ? Qui monopolisera les thérapies géniques ou la protonthérapie ? Cet automne, les cinq cantons dotés de facultés de médecine devront se livrer à ce troc très sérieux. Le but de l'exercice consiste à concentrer les disciplines, afin de soigner mieux tout en maîtrisant les dépenses".

Après le refus par Zurich d'un premier concordat sur la médecine hautement spécialisée, le 15 juillet 2005, le directeur général du CHUV (Centre hospitalier universitaire vaudois), Bernard Decrauzat, et le directeur médical des HUG (Hôpitaux universitaires de Genève), Pierre Dayer, s'étaient fâchés tout rouge. Zurich a encore enfoncé le clou le 12 mai dernier en présentant une expertise censée lui donner raison (voir nos éditions du 13 mai). Cinq mois avant la prochaine réunion de la CDS (Conférence des directeurs cantonaux de la santé), le directeur général des HUG, Bernard Gruson, estime pourtant que Genève, Vaud et Zurich pourraient trouver des terrains d'entente. Entretien :


"Le président de la CDS, Markus Dürr, a affirmé que 'l'expertise commandée par Zurich influencerait les prochaines discussions de la Conférence'. Ce message vous inspire-t-il quelque inquiétude?

Aucune! Nous devons effectivement atteindre un degré plus élevé de concentration en médecine hautement spécialisée, mais de façon multiforme. Un réseau national ne saurait se constituer à coup d'ukases centralisateurs.

Zurich privilégie une concentration accrue, passant par deux pôles : l'un sur les bords de la Limmat et l'autre sur le littoral lémanique. Cette perspective ne vous paraît-elle pas séduisante ?

Très séduisante, sans aucun doute. Mais Zurich ne peut pas pour autant faire abstraction des équipes en place. Il serait en effet rationnel de coopérer entre le duo CHUV/HUG et Berne pour la transplantation pulmonaire et entre le CHUV/HUG et Bâle pour les cellules souches. Je reste quoi qu'il en soit favorable à une concentration accrue de la médecine hautement spécialisée au sein d'un réseau. Et celui-ci ne doit pas se limiter à des bâtiments ou être gêné par des frontières cantonales.

Les experts consultés estiment qu'en médecine de pointe une intervention doit être pratiquée au moins cinquante fois par an dans un établissement. L'an dernier, à Genève, on n'a pourtant greffé qu'une quarantaine de foies et au plus une demi-douzaine de pancréas.

A Lausanne, à peine vingt-cinq cœurs et vingt poumons. Le maintien de ces interventions en Suisse romande se justifie-t-il?

Pour certains types d'intervention, il est logique d'aller jusqu'à une centralisation dans un lieu unique. Les patients doivent se déplacer. Mais Zurich ne constitue pas systématiquement le site de concentration idoine. Il serait ainsi parfaitement rationnel de concentrer à Genève toute la chirurgie de transplantation pédiatrique (notamment cardiaque et digestive). Pour la neurochirurgie, Zurich et Genève/Lausanne se compléteraient en revanche de façon tout à fait pertinente. Quant aux greffes d'organes évoquées dans votre question, je ne me prononcerai pas avant de connaître les évaluations de nos propres spécialistes.

Zurich reprochait entre autres à la défunte Convention intercantonale d'être plus fédéraliste que rationnelle. Partagez-vous ce point de vue ?

Je ne le conteste pas : ce concordat s'avérait plus fédéraliste que rationnel. Mais cet aspect ne me dérange pas. Il correspond à une réalité de notre pays à prendre en compte.

Le réseau romand CHUV/HUG se révèle-t-il une solution pragmatique ou juste fédéraliste ?

Les processus de concentration entre Genève et Lausanne donnent entière satisfaction. Nous sommes certains de soigner mieux qu'auparavant, sans augmenter les dépenses. Après tout juste deux ans d'expérience, il me paraît toutefois prématuré d'articuler des chiffres précis".

Une nouvelle Convention entre cantons est en préparation
"Le 12 mai dernier, la cheffe du Département zurichois de la santé, Verena Diener, a présenté une expertise liée à la consultation de onze spécialistes sévissant dans sept pays (France, Angleterre, Ecosse, Allemagne, Pays-Bas, Autriche et Etats-Unis).

Conclusion : en Suisse il faut centraliser la majeure partie des disciplines de médecine hautement spécialisée dans un ou deux centres. 'Tout passe en effet par la concentration', précisait la magistrate verte libérale.

Nous devons donc comprendre que le Conseil d'Etat zurichois avait raison de rejeter la Convention intercantonale sur la médecine de pointe en 2005. Celle-ci prévoyait une répartition des tâches entre cinq établissements. Zurich ne l'avait cependant pas refusée pour servir la médecine hautement spécialisée comme une grande cause nationale.

Erreur fatale à Zurich

Souvenirs. Le mercredi 21 avril 2004, à l'aube, une patiente reçoit un cœur incompatible avec son groupe sanguin à l'hôpital universitaire de Zurich. La malheureuse perd la vie vingt-quatre heures plus tard. Après 300 greffes du cœur, le chirurgien Marko Turina démissionne plusieurs mois avant sa retraite. Les enchères montent alors très haut pour débaucher son confrère de l'Inselspital de Berne, Thierry Carrel. Celui-ci dit oui à Zurich, puis non.

Le grand canton se trouve alors dans une position très difficile dans les négociations sur la médecine hautement spécialisée. Zurich accepte de lâcher les cœurs, tout en exigeant le monopole des transplantations de foies provenant de donneurs vivants. Genève et Vaud s'irritent et obtiennent gain de cause à l'Office fédéral des assurances sociales. Face à l'adversité, Zurich se montre un brin mauvais perdant et rejette la Convention intercantonale.

Au sein de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé (CDS), le grand bazar de la médecine de pointe recommence cet automne, avec la publication de trois rapports annoncés pour quasiment la même date : les conclusions définitives des experts mandatés par Zurich ; la sortie d'une étude réclamée par Bâle sur la médecine de pointe également ; et bien sûr le projet de nouvelle convention intercantonale émanant de la CDS. Zurich retrouvera-t-il alors son panache en respectant davantage ses partenaires ?"

Source :
© Tribune de Genève en ligne
Article de PHILIPPE RODRIK
Bernard Gruson
Laurent Guiraud

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