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"Greffe - Dons d'organes : les minorités défavorisées"

"Parce qu'il y a moins de donneurs compatibles, les personnes issues de minorités ethniques doivent attendre plus longtemps pour se faire greffer. Une situation difficile à évaluer en France, où les données sur l'origine des patients sont interdites."

"Les Français ne sont pas tous égaux face au don d'organes. Les personnes issues des minorités ethniques qui sont en attente d'une transplantation de rein sont en effet défavorisées par rapport aux personnes d'origine européenne. Motif : les donneurs compatibles sont trop peu nombreux au sein de leur communauté.

Une greffe rénale a en effet d'autant plus de chance de réussir que le patient 'ressemble' à son donneur. 'Les défenses immunitaires sont programmées pour reconnaître ce qui est étranger [à l'organisme], explique à LCI.fr le docteur Corinne Antoine, médecin-expert pour la greffe d'organe à l'Agence de la biomédecine. Pour cela, elles se basent sur les molécules HLA (Human Lococyte Antigenes), qui sont une sorte de carte d'identité personnelle que l'on partage à moitié avec ses parents, potentiellement, avec ses frères, ses sœurs mais aussi en partie avec d'autres personnes.'

Or, la répartition des molécules HLA n'est pas la même selon les régions du monde. Certaines d'entre elles sont plus fréquentes en Asie du Sud-Est qu'en Europe, par exemple. Ainsi, une personne née en Afrique ou de descendance africaine qui vit en Europe partagera des HLA avec beaucoup moins de gens que des Européens. 'Tous les pays occidentaux sont confrontés à ce problème' de compatibilité, souligne le docteur Antoine.

Au Royaume-Uni, les autorités sanitaires britanniques tentent de réduire cette fracture sanitaire en appelant les personnes d'origine antillaise, africaine ou asiatique à s'ouvrir davantage au don d'organes. Mais la situation est plus difficile à évaluer en France où la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) interdit d'utiliser des données sur l'origine ethnique.

Efficacité et équité

Les médecins français ont donc dû résoudre ce problème en se focalisant strictement sur les données médicales. En France, l'attribution d'un rein se fait sur la base d'un 'score' qui prend en compte des paramètres d'équité (durée d'attente, difficulté d'accès à la greffe) et des paramètres d'efficacité (donneur et receveur dans la même tranche d'âge, ressemblance HLA). La ressemblance immunologique se détermine sur 6 déterminants HLA.

Le système mis au point pour simuler la difficulté d'accès à la greffe permet ainsi d'identifier les receveurs ayant peu de donneurs compatibles (moins de 3 ressemblances sur les 6 requises) ou les receveurs ayant développé des anticorps suite à des transfusions ou des grossesses, leur interdisant un grand nombre de donneurs potentiels, pointe le docteur Antoine. Les personnes issues des minorités, ayant un groupe HLA rare pour l'Europe, sont ainsi 'détectées' par le système.

Freins à lever

Reste à inciter les différentes communautés à davantage faire des dons d'organes. 'Il faut comprendre les freins sans faire un chantage sur l'accès aux soins', plaide le docteur Antoine. C'est la démarche entreprise par Daniel Maroudy, ancien responsable des prélèvements d'organes à l'hôpital Saint-Louis. Les freins sont essentiellement culturels ou religieux. 'Le prélèvement d'organe sur une personne décédée - ce qui représente 94 pour cent des cas en France - renvoie à deux lieux d'interdits : le corps et la mort', explique-t-il à LCI.fr.

'Les campagnes d'information ciblées n'ont jamais été envisagées [par les autorités sanitaires], avance-t-il. Il y a une forme de censure ; la crainte de montrer sur la place publique que les communautés s'opposent au don d'organes.' Selon Daniel Maroudy, il faudrait mettre à disposition des équipes de prélèvement d'organes des kits pour leur apprendre à approcher les familles. Autre idée : sensibiliser les leaders d'opinion au sein de ces communautés. Autant d'approches qui demandent une révolution des esprits. Chez les donneurs potentiels comme au sein des autorités sanitaires."

Source :
http://tf1.lci.fr
Matthieu DURAND - le 24/06/2008

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