"'Je suis revenue sur la planète des humains.' Ce sont les premiers mots du témoignage qu'Isabelle Dinoire, première greffée du visage, a confiés au Monde. Cette femme, aujourd'hui âgée de 40 ans, analyse avec une lucidité et une intelligence très vives ce qu'elle a vécu depuis son accident, en novembre 2004, lorsque son chien lui a arraché le visage, et son opération le 27 mai 2005. Cette pionnière raconte, explique et commente tout à la fois cette première chirurgicale - réalisée par les professeurs Bernard Devauchelle et Jean-Michel Dubernard - et sa longue convalescence. On découvre une battante, timide et pudique, dotée d'une volonté farouche.
Comment vit-on avec le visage d'une autre ? A quel point se sent-on redevable au donneur ? C'est tout le sens de cet entretien. Le premier et le dernier, dit-elle. Un entretien destiné à une cause bien précise : 'Chacun devrait réfléchir aux dons d'organes.'
Hostile aux médias qui ont traqué sa famille après son opération, Isabelle Dinoire désire désormais retrouver l'anonymat. Elle vit très chichement, 'comme avant', dans le nord de la France. Démunie de diplômes et de métier, mariée très jeune puis divorcée, elle habite aujourd'hui seule avec ses deux filles et cherche un emploi. Elle a accepté, il y a quelques semaines, un travail à la chaîne dans une usine. Mais elle a dû renoncer à cause des horaires quotidiens (4 h-12 h) : 'Je ne tenais pas le coup.'
Son combat n'est pas seulement d'ordre physique. 'Une partie de moi et de mon identité a disparu à jamais, confie-t-elle. Et je garde précieusement en moi le souvenir de ce que j'étais.'"
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