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Le récit de la "première greffe totale du visage"

Le week-end du 26 et 27 juin 2010 restera dans les annales de la médecine. Voici le récit de la première greffe totale du visage.
Samedi 26 juin

"11 h La canicule frappe l’Hexagone depuis le milieu de la semaine. Rentré la veille des Etats-Unis où il donnait une série de conférences, Laurent Lantieri se rend à Nice pour assister l’après-midi à un mariage. Avec deux patients en liste d’attente pour une greffe du visage, il sait qu’on peut l’appeler à tout instant afin de lui annoncer qu’un donneur a été trouvé pour l’un d’eux. 'J’ai fait en sorte de bien dormir pour récupérer de mon voyage, raconte le chirurgien. Même si cela faisait plusieurs mois qu’on n’avait aucun coup de fil, il fallait que je sois prêt.'

13 h Tous les CHU de l’Hexagone ont des fiches de renseignement détaillées sur les deux greffons dont l’équipe du professeur Lantieri a besoin : couleur de peau, groupe sanguin, etc. Les services concernés disposent du numéro de portable du médecin, qui est joignable 24 heures sur 24. 'Ils ont aussi celui de mes collaborateurs', décrypte le spécialiste. Mais à 13 heures, c’est le sien qui sonne. Un hôpital de province lui annonce qu’un homme, dont la peau correspond point par point à celle de Jérôme, vient de décéder. Tout comme son chirurgien, Jérôme est à l’autre bout de la France. Laurent Lantieri l’appelle pour qu’il monte immédiatement à Paris. Jérôme a de la chance, il attrape le dernier train avant le lendemain matin. S’il l’avait raté, il n’aurait pas pu être opéré.

21 h L’homme décédé ayant déclaré de son vivant qu’il était favorable au don de ses organes, sa famille ne montre aucune opposition au prélèvement de son visage. Après avoir trinqué avec les mariés, le chirurgien saute dans une voiture — avec chauffeur, afin de garder toutes ses forces pour le marathon chirurgical qui s’annonce — et fonce en direction du CHU de province où le reste de l’équipe de l’hôpital Henri-Mondor l’attend déjà pour le prélèvement sur le donneur décédé. La course contre la montre a commencé. Un greffon a une durée de vie limitée : quatre heures pour un cœur, douze heures pour un foie et vingt heures pour un rein. Pour le visage, on ne sait pas très bien. Alors les médecins s’alignent sur le cœur. L’équipe de Créteil qui a déjà effectué quatre greffes sur les douze réalisées au monde, est bien rodée. Toutefois, le prélèvement auquel elle doit procéder cette nuit n’est pas tout à fait comme les autres. Pour la première fois au monde, les paupières du donneur, avec leur muscle releveur, leur glande et leurs voies lacrymales doivent être prélevées avec le reste du visage. A 21 heures tout le monde est prêt. Le temps d’effectuer les vérifications d’immunologie et autres critères de compatibilité, le prélèvement ne commencera que dimanche, à 2 heures du matin.

Dimanche 27 juin

9 h 30 Le visage du donneur a été prélevé, après plus de sept heures d’intervention. L’équipe d’Henri-Mondor saute dans un jet mis à disposition par l’Agence de biomédecine, direction le CHU Henri-Mondor à Créteil. Des médecins restent toutefois sur place pour reconstruire à l’identique la face du donneur afin que sa famille puisse récupérer sa dépouille. 'Il n’y avait pas la clim dans l’avion et il faisait une chaleur terrible, confie en rigolant le professeur Lantieri. Nous étions en nage, c’était assez épique. Mais le greffon, lui, était bien conservé.' Le futur visage de Jérôme est enfermé dans une glacière. Il faut impérativement qu’il soit transplanté dans les heures qui viennent. De son côté, à l’hôpital Henri-Mondor, Jérôme est déjà sur le billard. Des chirurgiens procèdent à l''exérèse' de son visage — Jérôme est 'scalpé' de la face — pour qu’il soit fin prêt lorsque le greffon arrivera.

21 h 30 La transplantation va durer douze heures. Mais, si l’on compte le prélèvement effectué en province, cela fait deux jours — en dehors de deux pauses de quarante-cinq minutes — que Laurent Lantieri n’a pas dormi et près de vingt-quatre heures qu’il opère. Pourtant, une fois l’intervention terminée, le médecin ne trouve pas le sommeil. Il sait qu’il vient d’achever la première mondiale que tous les chirurgiens de la face rêvaient de réaliser. Il repasse dans sa tête les images de l’opération. L’une d’elles restera gravée à jamais : celle de Jérôme, allongé sur la table d’opération, au moment où il n’a plus son ancien visage mais pas encore le nouveau, écorché vif, avec ses seuls globes oculaires au milieu de la face. Un frisson traverse le dos du chirurgien. 'Il faut vraiment être fou pour faire un truc pareil', souffle-t-il, en souriant."

Source :
http://www.leparisien.fr/societe/les-coulisses-d-une-prouesse-chirurgicale-08-07-2010-993274.php
 

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